Ainazi - Narva
Elle s'est faite toute pimpante et coquette pour notre arrivée. Elle s'est vêtue de couleurs vives, a festonné ses parterres de perces-neige et broder des semis de violettes dans ses sous-bois, elle a cousu des cornes d'abondance, des dentelles et des motifs végétaux sur ses portes, a épinglé des arabesques à ses frontons et des fleurs de coton dans ses ciels, elle a posé des cabochons de pierres sur ses rivages et des franges de roseaux dans ses marécages, elle a ourlé le littoral de falaises blanches.
Depuis Ainazi, en passant par Kihola, Vaâna Joesuu, Talinn, les baies de Loksa et de Vosu et le parc national de Lahama, l'Estonie assemble des morceaux de campagnes paisibles, de forets magnifiques, de rivières galopantes, de hameaux charmants, de rives bleues, de plages désertes en un patchwork calme et tranquille. Même Tallinn a des allures de provinciale. Du haut du clocher de l'église Oleviste le regard ne se perd pas si ce n'est dans la mosaïque des toits de la vieille ville médiévale. Et il y flotte même un petit air désuet à la terrasse du Café Chocolaterie, rue Vene où Jo Dassin resurgit d'un lecteur CD en chantant " Qu'il est long, qu'il est loin ton chemin papa..."
Il n'y a guère qu'a l'approche de la frontière russe que les villes deviennent fantômes, de nombreux bâtiments de l'ère soviétique sont à l'abandon et il faut se rendre au "Konsom" ou au "Remi" pour y trouver un peu de vie. A Narva Joesuu, à l'embouchure de la rivière, tout est déjà écrit en cyrillique, 86 % de la population est russophone et seul un pont nous sépare encore de la Russie.